Papa
Je t'écris ces mots avec un cœur lourd de chagrin, mais aussi rempli de gratitude et d'amour pour tout ce que tu as été pour moi et pour notre famille. Tu étais un père exceptionnel, aimant et discret, toujours prêt à donner un coup de main. Ton humilité et ta générosité ont été des modèles pour tes enfants.
Je me souviens de tes histoires sur tes campagnes de pêche à Dakar, où tu as commencé à travailler à 14 ans parce que tu préférais les bancs de thons, aux bancs de l'école. Tu as construit une vie remarquable, fondée sur le travail acharné, la fidélité et l'amour que tu portais à tes enfants ainsi qu'à Maman. 61 ans de mariage, c'est un exploit rare et précieux dont peu de gens peuvent se vanter.
Votre complicité et votre amour mutuel étaient une source d'inspiration pour nous tous.
Parti de rien je suis fier de l'homme que tu étais et de l'éducation que tu nous as donnée. Un fils entrepreneur, une fille artiste et un fils professeur tu n'as pas à rougir de ce que tu as accompli.
Tu as réussi à nous offrir une belle vie, malgré les difficultés et les épreuves que tu as rencontrées tels que ton naufrage avec la perte de ton matelot et de ton bateau, le diagnostic de ton parkinson, ton lymphome combattu tout seul pendant le covid ou je te déposais à l'hôpital et ou j'avais mal pour toi de devoir t'abandonner seul face à une épreuve que je connais si bien mais pour laquelle moi j'ai pu être épaulé par une femme courageuse, la famille et les amis. Puis est arrivé ton opération du genou. Là on a bien compris que tu commençais à en avoir ras la patate comme tu le disais.
Mais tu t'es toujours relevé dignement, dormir seul sans ta femme, a été en somme, ta plus dure épreuve. Avec elle, vous avez toujours été présent pour nous soutenir et nous encourager. Pudique, les mots n'étaient pas toujours là mais les gestes eux, parlaient d'eux-mêmes et nous montraient à quel point tu nous aimais.
Je me souviendrais toujours de ces moments partagés lors des saisons de pêche aux crabes ou je vomissais tripe et boyaux malgré que tu prenais ma place à la préparation du peita à l’arrière du bateau entouré des odeurs de poisson et des vapeurs de mazout. Pendant ce temps tu me laissais confortablement installé à la barre. Au retour de me préparait de succulents sandwichs aux beefsteaks après quoi tu m’envoyais faire la sieste dans la cale du Jupiter quand il pleuvait, ou parfois sous le banc ou tu étais assis tenant la barre et que nous étions chassés par la tempêtent. Tu avais peur que je reste bloqué dans la cale en cas de naufrage. Mais le plus souvent s’était en plein soleil à l’avant du bateau pré du mat. Et là tu venais accrocher un ciré pour me protéger du soleil. Encore les gestes d’amour d’un père pour son fils.
Et ce jour de juillet 1981 ou pour me récompenser de ma première saison de pêche, tu m’as accompagné au garage de la maison de Ciboure pour que je découvre que tu m’avais fait la surprise de m’acheter la plus belle mobylette de chez Lapitz. Une 51 West. A l’époque le plus beau moment de ma vie. Encore un geste…
Ou encore de ces fins de semaine ou on partageait le mantia, et ces fins de mois d’aout ou je jetais sur mon lit des quantités de billets qu’un garçon de mon âge n’aurait jamais pu gagner sans un père comme celui-là. Au début une demi part puis par la suite une part entière.
Nos sorties en camping-car à Iraty, à vieux Boucau, à Port La nouvelle, à Collioure, ou en Bretagne quand Nouga a mis bas sur le retour dans le camping-car et que tu aidais les 7 petits à sortir et que je me plaignais de ne rien voir car j’avais pris le relais au volant. Ces nombreux pique niques en famille.
Ton dernier canyon avec nous à 71ans. Il y aurait tant à se rappeler. Et à énumérer. Que de merveilleux souvenirs à partager avec mes enfants.
Tes derniers jours ont été particulièrement difficile pour nous, pour toi davantage j’imagine, alors que tu ne mangeais pratiquement plus tu as encore fait l’effort de manger les fruits et le yaourt maison que je t’avais apporté, cela m’avait donné espoir et un peu de paix à l’âme, encore un geste d’amour…
Maintenant que tu es parti, je sens un vide immense.
La vie qui me paraît déjà bien difficile, va l'être davantage encore sans toi.
Je te remercie Papa pour ce bel exemple de vie et pour tout ce que tu as fait pour moi, pour notre famille. Je prends la parole car je suis l’ainé mais c’est unanimement que ta famille t’aime, et tu nous manques déjà.
Merci, Papa.
Ps : Même si je ne suis pas croyant, je ferai comme avec amatxi marga, et même si je sais que, comme elle, tu ne me répondras pas, je te parlerai mentalement quand la vie sera trop dure à supporter, car au final, ce doit être la seule chose que je puisse te reproche.
Tant que je vivais sous ton toi, je ne me suis pas rendu compte d’une chose.
La vie n’est pas facile.